«Voyage au bout de la nuit» d'Alice Ronfard au Monument-National – Bible urbaine

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«Voyage au bout de la nuit» d’Alice Ronfard au Monument-National

«Voyage au bout de la nuit» d’Alice Ronfard au Monument-National

Un rendez-vous manqué

Publié le 31 octobre 2013 par Marie-Michèle Martel

Crédit photo : École nationale de théâtre du Canada

Du talent, une mise en scène intéressante, des décors et des éclairages plus que réussis, et pourtant la pièce Voyage au bout de la nuit, originalement un roman de Louis-Ferdinand Céline, n’aura su combler les attentes de son public. Voici une critique crève-cœur, mais dont il faut malheureusement écrire la véritable fin.

Dans un tout autre contexte, ces finissants de l’École nationale de théâtre du Canada nous auraient charmés. Il faut l’avouer, ils ne nous ont pas laissés de glace. C’est plutôt la durée de la pièce et le texte en lui-même qui ont déçu le public. Quatre heures au total, avec deux entractes. Pas étonnant que quelques spectateurs aient quitté à chaque pause.

Suite au décès de sa grand-mère Caroline, l’univers du jeune Ferdinand s’effondre. La boutique de dentelles de ses parents ne fonctionne plus et son père devient de plus en plus agressif, impatient. Celui-ci, le trouvant particulièrement paresseux, tentera de le placer à différents endroits (que ce soit  pour des emplois ou dans une école) pour le responsabiliser. Seulement, hanté par une rumeur selon laquelle il se laisse aller à des plaisirs légers, les personnages profitent de sa naïveté l’un après les autres. Une histoire de famille où l’amour et la confiance ne sont pas au rendez-vous.

Une adaptation, signée Wajdi Mouawad, pique certes la curiosité, surtout lorsqu’on sait que c’est cette adaptation qui lui a fait découvrir le théâtre qu’il voulait faire. Peut-être est-ce parce qu’il n’était qu’au tout début de son processus de création que le texte aura alourdi autant le récit. Après tout, nous étions bien avant Littoral ou Incendies. Il faut tout de même dire que les pointes d’humour étaient particulièrement bien choisies et insérées au moment opportun pour éveiller la réaction du public. Sans ces moments d’humour, la pièce n’aurait été que découragement, désespoir et, comme le dit si bien un des personnages, en manque d’amour.

Nous avions annoncé une critique en deux temps. Et ce deuxième temps est maintenant arrivé. Il est important de souligner le travail des décors (Pierre-Luc Boudreau) et des éclairages (Élise Neil) qui étaient en véritable harmonie et grâce auxquels la mise en scène plus qu’intéressante d’Alice Ronfard se glissait aisément. Aucun accrochage. Un accord parfait entre les trois. Remarquons d’ailleurs une mise en scène qui n’a pas peur de mettre l’action en arrière-plan ou même de montrer des personnages de dos. Enfin, un peu de changement.

Et les finissants ne sont pas bien loin. Bien que leur jeu nous a semblé plutôt classique (le texte l’exigeait à sa façon), la coordination et leur travail d’équipe se ressentaient bien sur scène. Un échange de répliques dynamique, mais aussi une gestuelle qui traduisait bien l’ambiance du texte. Certains se sont détachés du lot et voici nos mentions spéciales. D’abord à Benoît Arcand, dont l’interprétation fut une excitation de toutes les répliques, tant dans la voix que dans les gestes. Une mention plus «comique» pour Julien Thibeault et son look à la Jean Dujardin.

Voyage au bout de la nuit n’est pas un flop, mais plutôt un rendez-vous manqué. Bien qu’il s’agisse, nous nous en doutons bien, d’un véritable défi pour ces finissants de l’École nationale de théâtre, il n’en demeure pas moins qu’elle n’aura pas su captiver son public pendant ses quatre longues heures.

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