«Le baptême de...» Damien Chazelle – Bible urbaine

Cinéma

«Le baptême de…» Damien Chazelle

«Le baptême de…» Damien Chazelle

«Guy and Madeline on a Park Bench» (2009): les premières notes d'un cinéaste prodige

Publié le 17 octobre 2016 par Alexandre Beauparlant

Crédit photo : Tous droits réservés (Whiplash)

Le talent lui sort par les oreilles, ce qui n'empêche pas l'expression «Damien qui?» d'être encore en vigueur aujourd'hui. Jadis étudiant en musique et pas assez talentueux pour atteindre le niveau d'excellence qu'il s'était fixé, Damien Chazelle se tourne vers son autre amour, le cinéma. Au final, force est de constater qu'autant les cinéphiles que les mélomanes pourront savourer les œuvres du jeune homme, à commencer par Guy and Madeline on a Park Bench, un hommage senti aux films musicaux d'antan. Comme quoi le bonheur des uns fait parfois aussi le bonheur des autres!

Dans les médias, nous autres critiques avons tendance à nous emporter pour des riens (eh oui, qui l’eût cru), alors que certains termes jubilatoires tels que «génial!!!», «grandiose!!!» ou autre «film de l’année!!!» de votre choix jouissent d’une utilisation inconsidérée. Employés à toutes les sauces et à l’usure, ces mots en viennent inévitablement à perdre de leur force au point de ne plus signifier grand-chose. Après tout, ce ne sont pas tous les bons films qui donnent envie de se lever de notre siège et d’applaudir à la gloire du septième art. Applaudir, oui! Chaudement, avec sincérité, pour remercier un réalisateur de l’enivrant cadeau offert à son public, présent et surtout futur.

En ce qui me concerne, ce sentiment de profonde exaltation ne prend place qu’une ou deux fois l’an et même parfois pas du tout (2016 me fait encore languir et ne venez pas me parler du The Revenant). Il y a deux ans, c’est Whiplash qui me frappait de son plein fouet. Tous les éloges pompeux énumérés au précédent paragraphe ne suffisent pour décrire à quel point ce film signé Damien Chazelle représente une merveille de cinéma. En un mot comme en cent, le réalisateur m’avait conquis, tout comme il risque de le faire avec vous si ce n’est déjà fait! On me susurre d’ailleurs à l’oreille que le titre serait disponible sur Netflix Canada. Allez!

Mais avant d’en arriver à ce classique instantané, le jeune cinéaste américain se fit les dents sur un projet issu des bancs d’école, à savoir Guy and Madeline on a Park Bench. D’abord destiné à être un court-métrage, le film prend vite du galon, si bien que le réalisateur décide de prendre une année sabbatique pour se consacrer à la finition de son bébé. Tournage durant quelques jours, financement à l’aide de donations et de petits boulots, tournage à nouveau et ainsi de suite; ce ne sont pas les efforts ni la motivation qui manquent! Mais au fait, qu’est-ce que ça raconte?

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Un garçon, une fille, un banc de parc et une rupture. Lui est un jeune trompettiste au talent prometteur. Elle est une jeune étudiante un peu perdue. Il se nomme Guy (Jason Palmer, un réel aspirant trompettiste). Elle se nomme Madeline (Desiree Garcia). Si l’une repart du parc, le cœur brisé, l’autre se libère, du moins le croit-il.

Pour lui, l’après-Madeline contiendra des flirts sans lendemain, mais surtout de longues nuits festives infusées de jazz. Et des regrets?

Pour elle, l’après-Guy sera d’abord morose. Petit job sans intérêt et rencarts ratés occuperont son quotidien, jusqu’à la rencontre d’un gentil nouveau garçon. Sera-t-il trop tard pour Guy?

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La trame narrative demeure simple, mais là ne repose pas le cœur insufflant au récit une fraîcheur revigorante. On doit plutôt ce phénomène aux différents numéros musicaux disséminés au sein du film. Et qu’elles soient le fruit d’un trompettiste inspiré ou d’une danseuse à claquettes souriant à la vie, ces performances ont de quoi charmer, voir même ravir dans certains cas.

Pour l’inspiration, Damien Chazelle et son acolyte Jason Palmer (rencontré quelques mois plus tôt performant dans un bar jazz de Boston) puisaient à même d’anciennes reliques filmiques des années 1930, époque où le son faisait encore l’objet d’expérimentations innovatrices. Parmi les œuvres citées, le court-métrage Black and Tan Fantasy (1929), mettant en vedette Duke Ellington, ressort du lot comme point d’ancrage principal. Œuvre faisant partie du domaine public, les plus curieux pourront facilement la dénicher en ligne (YouTube).

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L’approche «documentaire», avec quantité de plans serrés et une caméra portée à l’épaule, renforce le sentiment de proximité avec les deux protagonistes que sont Guy et Madeline. L’usage du noir et blanc sur bobine 16mm confère quant à lui une touche supplémentaire de réalisme, en plus de rehausser l’esthétisme de la chose. Parce que le noir et blanc, c’est beau! Et parlant de beauté…

Au tournant de 2009 et de la promotion de son film baptême, Chazelle déclarait qu’il lui restait au moins un musical à produire. Parlait-il de son nouvel opus qui prendra l’affiche en décembre prochain?

«I’ve come up with alot of ideas about this genre that I’d like to play around with, but I’m not relegated to musicals and I don’t want to do musicals my whole life.»

Nous verrons donc très bientôt de quelles idées il s’agissait et jusqu’ici l’écho des critiques initiales de La La Land, mettant en vedette Ryan Gosling et Emma Stone, annonce qu’elles étaient belles, ces idées! Cette citation du réalisateur laisse aussi entrevoir un fol éventail de possibilités quant aux prochains projets auxquels pourrait s’attaquer Chazelle. Suis-je le seul à croire que tout ce qu’il touche se transforme en or?

Mon coup de cœur parmi la filmographie de Damien Chazelle: aucun suspense ici, c’est Whiplash (2014).

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