«Les lectures des otages» de Yôko Ogawa – Bible urbaine

LittératurePolars et romans policiers

«Les lectures des otages» de Yôko Ogawa

«Les lectures des otages» de Yôko Ogawa

Confessions avant la mort

Publié le 28 juin 2012 par Éric Dumais

Crédit photo : Leméac Éditeur

Publiée chez Actes Sud, l’œuvre de Yôko Ogawa est dense et magnétique. Après avoir remporté le prestigieux prix Akutagawa en 1991 pour La grossesse, l’écrivaine d’origine japonaise récidive avec Les lectures des otages, un roman en apparence léger, duquel se dégage une violence latente, symbole de la violence et de la folie de notre époque.

Le roman a d’abord été publié en quatre livraisons de septembre 2008 à septembre 2010 dans la revue Chûo kôron. Œuvre politique, de la compassion et de la violence d’une société malade, Les lectures des otages demeure un commentaire lucide sur la modernité, dont la ligne directrice rejoint adéquatement la ligne politique de la revue.

Huit touristes étrangers ont été pris en otages. À la suite d’une vaste mobilisation médiatique, une seule d’entre elle décide de poursuivre sa mission, alors que la presse internationale s’est déjà résignée. L’ONG, présente dans la région, réussit à introduire un nano enregistreur dans une boîte de premiers soins destinées aux otages, ce qui permettra à un jeune homme, à des kilomètres de là, d’écouter, un casque sur les oreilles, les confessions des huit otages. Chaque soir, chacun d’entre eux prend la parole pour raconter, une dernière fois, un précieux souvenir ayant marqué sa vie.

Les lectures des otages est un court roman polyphonique divisé en huit voix et en huit chapitres. Le lecteur adopte donc, au fil de sa lecture, la position privilégiée du lecteur-témoin, comme ce jeune inconnu qui écoute, seul, les confessions de huit pauvres gens dont la fin inéluctable approche à grands pas.

Yôko Ogawa nous sert, avec cet énième roman, une œuvre fascinante mais dure à cerner, puisque les huit confessions sont en réalité huit courtes histoires tournant toutes autour de la mort, sans aucun lien apparent. Évidemment, ces fragments d’un subconscient paniqué sont des souvenirs de gens qui essaient vainement d’échapper à la mort, ce qui peut expliquer, peut-être, le caractère unique de chacun.

Si ce n’était de la plume sobre et habile de l’auteure, Les lectures des otages ne serait qu’un roman quelconque, bien écrit, certes, mais loin d’être une œuvre marquant l’imaginaire. Il est intrigant, cependant, de lire les confessions de personnes désormais décédées, mais il manque une intrigue, un point d’attache, voire un intérêt à ce roman quelque peut déstabilisant.

Les amateurs de romans japonais retrouveront la finesse et l’agilité du verbe propres aux auteurs orientaux, mais peut-être pas leur prochain coup de cœur de la saison estivale.

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