«La vie d’artiste» de Catherine Ocelot chez Mécanique générale – Bible urbaine

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«La vie d’artiste» de Catherine Ocelot chez Mécanique générale

«La vie d’artiste» de Catherine Ocelot chez Mécanique générale

Étude d'une espèce

Publié le 29 mars 2018 par Sara Thibault

Crédit photo : Mécanique générale

Dans sa nouvelle bande dessinée, Catherine Ocelot mène sept entrevues avec des artistes de divers domaines et de différentes générations. À travers ses discussions avec Micheline Lanctôt, Rafaël Ouellet, Natacha Clitandre, Julie Delporte, Marcel Jean, Emmanuelle Caron et Daphné B., Catherine Ocelot se questionne sur la place de l’artiste dans la société.

Une des forces des livres de Catherine Ocelot réside dans son excellent sens de l’observation et dans le regard lucide qu’elle pose sur le monde qui l’entoure. Alors que ses précédentes bandes dessinéesNenette cherche un sens (2006) et Talk-Show (2016) – mettaient en scène des personnages provenant de l’imagination de l’auteure, La vie d’artiste comporte une grande part autofictionnelle et se situe à la jonction du récit autobiographique et de la série d’entretiens.

En plus de s’inscrire comme l’un des personnages principaux de la bande dessinée, Catherine Ocelot se sert des témoignages des artistes qu’elle approche pour éclairer ses propres doutes sur la légitimité de sa place dans le petit monde de la culture québécoise. Elle y aborde plusieurs enjeux d’actualité comme la conciliation maternité/création ou travail/famille.

Or, ses questionnements manquent de profondeur et restent souvent dans des lieux communs. Plusieurs pages ne dépassent guère l’anecdote et se perdent un peu dans l’introspection maladive des artistes. Paradoxalement, ce sont les histoires les plus banales en apparence qui font le plus réfléchir, notamment lorsqu’un recteur profite d’une rencontre impromptue au bord d’une piscine pour approcher la bédéiste pour un événement, puis se rétracte en apprenant qu’elle dépasse l’âge limite de 35 ans pour être admissible aux subventions universitaires. Ces moments sont ceux qui permettent le mieux de cerner les conditions parfois cruelles auxquelles sont confrontés les artistes au quotidien.

Si la BD contient plusieurs confidences lumineuses– comme l’amour que ressent Marcel Jean pour le cinéma québécois et ses artistes– Catherine Ocelot dresse un portrait globalement sombre de la vie d’artiste.

En revanche, les qualités visuelles de La vie d’artiste sont indéniables, de la finesse du trait de la dessinatrice au travail des couleurs souvent très vives. Les quelques dessins qui occupent des doubles pages méritent plusieurs minutes d’attention pour y percevoir tous les détails et toutes les nuances.

Le choix d’indifférencier les personnages en recouvrant le haut de leur corps de plumes d’oiseaux renforce l’impression d’avoir affaire à une étude de l’artiste comme «espèce» méconnue sur laquelle Ocelot fonde ses recherches. Cela permet également au lecteur de concentrer son attention sur les propos des différents intervenants et de se laisser porter par les mises en situation imaginaires dans lesquelles la bédéiste les place (le toit de la Cinémathèque, une piscine municipale).

Bien que le projet de transposer en bande dessinée les angoisses des artistes québécois semblait prometteur, Catherine Ocelot n’avait peut-être pas le recul nécessaire pour trouver la manière de susciter un réel dialogue avec le lecteur et pour l’inclure dans des questionnements existentiels qu’il partage pourtant.

«La vie d’artiste» de Catherine Ocelot, Éditions Mécanique générale, 208 pages, 29,95 $.

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