«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de «Master Of Puppets» de Metallica – Bible urbaine

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«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de «Master Of Puppets» de Metallica

«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de «Master Of Puppets» de Metallica

Métal, thrash et cheveux longs

Publié le 15 décembre 2016 par Isabelle Lareau

Crédit photo : Elektra et Harald Oimoen

Le groupe a vu le jour en 1981, à Los Angeles, suite à une initiative de Lars Ulrich, qui souhaitait former un groupe métal. Par le biais de deux annonces dans un journal, il recrute James Hetfield et, ensuite, Dave Mustaine. Lors des premiers enregistrements, Hetfield jouait de la basse. Les choses ont bien changé depuis!

Ils trouvent un bassiste, Ron McGovney, qu’ils remplacèrent peu après par un autre plus talentueux, Cliff Burton. Le chanteur et le batteur ont de fortes de personnalités et sont très ambitieux; ils ne tolérèrent pas la faiblesse. Le groupe lance un premier album, Kill ‘Em All, en 1983, et se fait aussitôt remarquer par la communauté métal. La chanson «Metal Thrashing Mad» d’Anthrax (tiré de l’album Fistful of Metal, paru en 1984) inspire les journalistes, ceux-ci récupèrent le mot thrash pour définir ce type de musique métal agressif et rapide. Metallica hérite de ce qualificatif (tout comme Ozzy Osborne, Slayer et Megadeth, baptisés les Big Four of Thrash).

La même année, le quatuor sort Ride the Lightning, qui connaît autant, si ce n’est pas davantage, de succès que son prédécesseur. D’ailleurs, c’est grâce à ce disque que les fans sont introduits au nouveau guitariste, Kirk Hammett. En effet, Dave Mustaine, qui est un très bon guitariste et a qui a créé quelques-uns des riffs les plus distinctifs du groupe, se fait montrer la porte; Ulrich et Hetfield lui reprochant sa dépendance à l’alcool. Cette décision brise le cœur de Mustaine, qui créera Megadeth par la suite. La suite des événements est, disons, moins élégante: des propos pleins de vitriol fusent des deux côtés dans le cadre de diverses entrevues, au fil des années. Récemment, Mustaine a rejoint Metallica sur scène et les gars semblent s’être réconciliés, mais le chemin de la rédemption fut long et tortueux.  

Mais revenons à 1985, lorsque le quatuor, très enthousiaste, entra en studio en compagnie du réalisateur Flemming Rasmussen (qui était l’assistant-réalisateur de Ride the Lightning). Ils enregistrèrent une première version de Master Of Puppets et le mixage déplaît aux membres du groupe. Celui-ci, voulant rectifier le tir, envoya les bandes originales à Michael Wagener (qui a travaillé avec Mötley Crüe sur Too Fast for Love (1981) ainsi que No More Tears d’Ozzy Osborne (1991)). Cette fois-ci sera la bonne et l’album se retrouve, finalement, dans les bacs le 3 mars 1986.

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Le disque se vend à plus de six millions de copies aux États-Unis et à plus de 600 000 au Canada. Metallica a désormais un vaste public, dépassant largement la communauté très protectrice de la scène métal. Les critiques reconnaissent l’avant-gardisme de cet album. Malheureusement, ce succès sera assombri par le destin; le 27 septembre 1986, Cliff Burton meurt écrasé sous l’autobus de tournée alors que le groupe est en Suède. Cette tragédie marqua à jamais Hetfield, Ulrich et Hammett. Ils embauchèrent un nouveau bassiste, Jason Newsted. Cependant, ce deuil affecta leur jugement; ils font la vie dure à Newsted. Un peu comme si les gars avaient trouvé un sac de sable pour se défouler…

Lorsque je voyais des entrevues de Metallica à la télévision, j’avais toujours froid dans le dos quand je constatais le traitement réservé à Newsted; ils se savaient méchants envers lui, mais ne faisaient rien pour changer la situation. Comme je le mentionnais plus haut, le groupe voulait laisser sa marque, à un point tel qu’ils ne comprenaient pas, et ont refusé, que le bassiste ait un groupe en parallèle (Echobrain). Il a donc quitté la formation avant que celui-ci entre en studio pour enregistrer St. Anger (2003).

J’ai découvert Metallica, grâce à leur disque homonyme, paru en 1991, connu également sous le nom de The Black Album. J’aimais beaucoup leur son agressif. Cela peut sembler étrange, mais certains groupes ont réellement mauvaise presse dans l’industrie et sont étiquetés de «démoniaques». Et c’était le cas de cette formation, que l’on accusait de satanisme, bien que ce ne soit pas le thème principal de leur œuvre. Je me souviens, à cette époque, une adulte m’avait dit que j’irais en enfer parce que j’écoutais Metallica. Une perspective plutôt intéressante: si les gens condamnés à la damnation éternelle avaient d’aussi bons goûts en musique, j’étais prête à aller les rejoindre!

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Mais c’est Master Of Puppets, que j’ai écouté beaucoup plus tard, qui a créé, chez moi, un sentiment de respect vis-à-vis leur talent et leur contribution à la musique. Ils défient le genre métal, ont des chansons de plus de huit minutes frôlant même, à quelques occasions, la musique progressive («Orion») et ne se forcent pas à jouer le plus rapidement possible. Ils s’inspirent très peu de l’imagerie traditionnelle des formations métal et optent pour des sujets plus concrets, et parfois dévastateurs, tels que la toxicomanie, la remise en question de la foi, la maladie, la folie, la peur et la politique.

Par exemple, Hetfield a écrit «Leper Messiah» en réaction au décès de sa mère (alors qu’il avait 16 ans). Celle-ci, se sachant atteinte du cancer, était très croyante et a préféré s’en remettre à la volonté de Dieu, délaissant ainsi les traitements médicaux conventionnels.  De plus, les thèmes de la violence et de la colère sont bien présents. Les très puissantes «Battery» et «Welcome Home (Sanitarium)» sont une véritable ode à l’agressivité meurtrière, tandis que la chanson-titre, «Master Of Puppets», parle de dépendance aux drogues. Un titre de plus de huit minutes, dont le rythme et, plus spécialement le jeu de guitares, se transforment. Un peu comme s’ils avaient fusionné deux chansons pour en créer une seule. La façon de chanter de Hetfield donne des frissons, la hantise d’un maître qui s’approprie notre contrôle est belle et bien présente. Et le rire à la fin, brrr… «Disposable Heroes» est un commentaire social sur l’armée et l’obéissance aveugle dont doivent faire preuve les soldats. Il y a tout de même un peu de fantastique sur ce disque: «The Thing That Should Not Be» est inspiré par les écrits de H. P. Lovecraft!

Ces thématiques conviennent parfaitement aux metalheads et aux mélomanes qui aiment la musique brutale, pesante et mélodique. La rage de Metallica est particulièrement palpable, que ce soit dans le rythme, les solos de guitare ou la voix d’Hetfield. Master Of Puppets est toujours aussi solide, trente ans plus tard, et s’écoute tout aussi bien.

On accepte volontiers le risque de brûler en enfer, en fait, nous serons sûrement plusieurs…

Surveillez la prochaine chronique «Les albums sacrés» le 12 janvier 2017. Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.

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