«Les albums sacrés»: le 50e anniversaire de «Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band» des Beatles – Bible urbaine

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«Les albums sacrés»: le 50e anniversaire de «Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band» des Beatles

«Les albums sacrés»: le 50e anniversaire de «Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band» des Beatles

Le nouveau standard

Publié le 11 mai 2017 par Mathieu St-Hilaire

Crédit photo : www.sgtpepper.thebeatles.com

S’il fallait choisir un album qui explique l’existence d’une chronique comme Les albums sacrés, Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band ferait fort probablement partie des choix à retenir. Paru dans ce que plusieurs considèrent comme étant l’année la plus importante pour la musique populaire contemporaine, le huitième album des Beatles représente l’œuvre où le groupe tente de parfaire l’idée de l’album concept jusqu’au bout. S’agit-il du meilleur album de leur carrière? Probablement pas. S’agit-il de leur plus grande évolution? Je ne crois pas non plus. Par contre, sa place à l’intérieur de la culture populaire occidentale est incomparable, son aura planant, choix de verbe volontaire ici, au-dessus de la contre-culture des années 1960.

Comme d’habitude, les attentes pour le prochain album étaient complètement disproportionnées. Le groupe venait de faire paraître un album révolutionnaire en Revolver. De plus, le fab four avait tout bonnement décidé de lancer un duo de singles tout aussi ahurissants en «Strawberry Fields Forever» et «Penny Lane». La formation de Liverpool a donc le vent dans les voiles en entrant en studio. Rien de bien nouveau, finalement.

Toutefois, il semble que tout change rapidement à l’époque: la culture évolue à une vitesse jamais vue auparavant. Au niveau musical, ce sont une semaine les Rolling Stones, l’autre les Doors, sans oublier The Kinks, The Byrds ou un certain Hendrix. Et dans l’impopulaire-mais-innovateur, il y a le Velvet Underground de Lou Reed ou les Mothers of Invention de Frank Zappa.

Oui, la discographie des Beatles est déjà fort impressionnante, sauf qu’ils doivent, eux aussi, laisser leur empreinte sur cette année où tout semble permis et où chaque idée est poussée le plus loin possible, souvent avec l’aide de psychotropes. Autrement dit, dans toute cette palette de couleurs, les Beatles doivent aussi y faire leur propre assortiment pour arriver avec un mélange harmonieux. Ainsi arriva l’album concept qui changea le monde.

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Et comme s’ils savaient que leur long-jeu allait faire partie de l’histoire, les Beatles arrivèrent avec une pochette iconique, où ils sont représentés avec une légion de célébrités provenant de toutes les sphères de la société. Pas surprenant que l’album tire dans tous les sens, le groupe ayant acquis une confiance sans précédent (Lennon ayant déjà mentionné que le groupe était plus populaire que Jésus) et, surtout, s’intéressant constamment à tout ce qui se passe dans la culture populaire. Ainsi, lorsque le rideau se lève sur le groupe fictif que représente le Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band sur la toute première pièce qui porte le même nom, l’introduction nous donne déjà l’impression que la formation vise à atteindre des nouveaux standards de créativité et d’imagination.

Les costumes hyper colorés et les moustaches donnent une allure plus ensoleillée au groupe, et le tout se reflète dans la musique, plus joyeuse et entraînante que leurs deux albums précédents. «With a Little Help from my Friends» en est un parfait exemple, avec sa mélodie qui reste instantanément en nous, et une prestation vocale toujours aussi rigolote de Ringo Starr qui nous donne envie de se cajoler. «Lucy In the Sky With Diamonds», avec ses possibles références à la consommation de LSD, est une chanson kaléidoscopique qui fait planer dans les couplets et qui explose de joie aux refrains. «Newspaper taxis appear on the shore / Waiting to take you away / Climb in the back with your head in the clouds / And you’re gone», chantonne un John Lennon visiblement apaisé dans sa rêverie.

Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band doit son existence à Paul McCartney, grand visionnaire du projet et grand manitou derrière la création du concept, des pièces et de l’esthétisme entourant l’album. Son influence sur les compositions est omniprésente. «Getting Better» est une chanson typiquement McCartney, avec une instrumentation pop bien fignolée et des back vocals qui proviennent de partout. «Fixing a Hole» est d’une influence très baroque, avenue que McCartney avait empruntée sur les albums précédents. La sublime «She’s Leaving Home» poursuit dans la même veine, l’imagination débordante de l’auteur-compositeur pour les arrangements de cordes rappelant la fameuse «Eleanor Rigby» de Revolver.

S’il y a probablement un seul bémol à cet opus, c’est le manque de Lennon et, surtout, de Harrison. En effet, la contribution de George Harrison est minime, se limitant à «Within You Without You», qui explore des sonorités indiennes qui font penser à Ravi Shankar, sitariste légendaire ayant grandement influencé le musicien. Lennon apporte ses couleurs à la très éclatée «Good Morning Good Morning» et «Being for the Benefit of Mr. Kite!», qu’on croirait être une chanson écrite pour un cirque.

La pièce centrale de l’œuvre se retrouve toutefois à la toute fin et marque un moment important dans l’histoire du groupe. Considérée par plusieurs comme la meilleure chanson de l’histoire du groupe, «A Day In the Life» représente tout ce qu’il y a de merveilleux chez les Beatles: une mélodie inoubliable, des arrangements innovateurs et extraordinaires, un changement de dynamique magistral, des prestations vocales impeccables de Lennon et de McCartney, etc.

Le catalogue des Beatles comporte plusieurs chansons révolutionnaires, et «A Day In the Life» en fait non seulement partie, elle laisse l’auditeur sans mot cinquante ans plus tard. Sans doute fait-elle partie des raisons qui poussèrent le journaliste Kenneth Tynan, du Times, à déclarer l’album comme étant «un moment décisif de l’histoire de la civilisation occidentale».

Lorsque les dernières notes jouées simultanément par les trois pianos sonnent le glas de Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band, c’est comme si une partie des années soixante se terminait et qu’une autre débutait. L’album aura un impact sans précédent, attirant les louanges des critiques et du public. Il conduira même Brian Wilson, leader des Beach Boys, à une longue dépression. Le disque, sorti le 1er juin, demeurera numéro un pendant vingt-sept semaines au Royaume-Uni et quinze semaines aux États-Unis, devenant la bande sonore du fameux Summer Of Love de 1967.

Et bien qu’une multitude de groupes et d’artistes produisirent des albums mémorables lors de l’année 1967, fort est à parier que leurs regards étaient rivés vers le ciel, directement sur le fabuleux quatuor de Liverpool, seuls dans leur stratosphère avec Lucie et ses diamants.

Surveillez la prochaine chronique «Les albums sacrés» le 25 mai 2017. Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.

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