«Elektra», dirigé par Yannick Nézet-Séguin, à l’Opéra de Montréal – Bible urbaine

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«Elektra», dirigé par Yannick Nézet-Séguin, à l’Opéra de Montréal

«Elektra», dirigé par Yannick Nézet-Séguin, à l’Opéra de Montréal

Un opéra pas comme les autres

Publié le 20 novembre 2015 par Alexandre Provencher

Crédit photo : Mathieu Pothier

C’est la première fois que l’Opéra de Montréal produit et présente Elektra de Richard Strauss. Peu importe sa mise en scène et son interprétation depuis 1909, cette œuvre, d’une complexité musicale et scénique monumentale, ne laisse aucun spectateur indifférent. Ce drame glaçant suscite une tension innommable du début à la fin. Et cette tension, on la retrouve au sein de la production! On en retient un orchestre solide, juste, dramatique et délicat, dirigé consciencieusement par Yannick Nézet-Séguin, mais aussi une mise en scène imparfaite, surtout en ce qui concerne la direction des chanteurs.

Il faut le dire, Elektra est une histoire complexe à la base. Agamemnon, père d’Elektra, est assassiné par sa femme, Clytmnestre (Agnes Zwierko) et son amant Égisthe (John MacMaster). Leurs filles, Elektra (Lise Lindstrom) et Chrysothémis (Nicola Beller Carbone), sont confinées à une vie de misère dans leur palais. Elektra, dépressive et hystérique, rêve de vengeance, tandis que sa sœur rêve de liberté et de joie. Complotant pour tuer leur mère, les deux sœurs retrouvent leur frère revenu d’exil, Oreste (Alan Held). C’est lui qui, finalement, tuera sa mère et son amant, provoquant chez Elektra une danse extatique qui lui coûtera sa peau.

Malheureusement, le livret d’Hugo von Hofmannsthal minore le récit initial de Sophocle issu de la Grèce Antique. Plusieurs éléments importants ne sont pas expliqués, notamment le sacrifice d’Iphégénie par Agamemnon. De ce fait, l’histoire devient confuse pour quiconque ne la connaît pas. Malgré les problèmes du livret, Elektra demeure une œuvre fondamentalement intéressante sur le plan psychologique. Les personnages véhiculent, à leur tour, des émotions noires et perfides. Tous les tréfonds de l’âme sont révélés à travers cet opéra.

Une mise en scène discutable

Sur la scène trône une énorme, magnifique et impressionnante statue d’Agamemnon, produite par le sculpteur espagnol Victor Ochoa. Elle dépeint un homme recroquevillé et tailladé qui veille sur sa fille. D’ailleurs, Elektra s’y cache et y gravite tout au long de l’opéra. C’est le seul élément de décor en importance, puisque quelques escaliers et une échelle occupent le reste de la scène. De plus, un aspirateur-balai se trouve près de la sculpture, sans que personne ne l’utilise. Cet élément est totalement inutile.

Cette scène minimaliste laisse une liberté de mouvement aux chanteurs. Cependant, ceux-ci ne l’occupent pas très bien. Leurs mouvements sont répétitifs et confinés à un seul endroit. La direction des chanteurs, par Alain Gauthier, amène donc un poids supplémentaire à cet opéra déjà très dramatique. En supplément, la danse extatique finale n’est pas dansée. Elektra s’enroule dans un tissu brun sans que l’on décèle sa mort… En somme, c’est une mise en scène moins raffinée.

Une musique bien interprétée

La chimie opère entre maestros Yannick Nézet-Séguin et l’Orchestre Métropolitain, qui retrouve son chef après le passage un peu négatif de James Meena en septembre. Les moindres gestes du chef sont compris par les musiciens. À ce chapitre, une tension est créée dès la première mesure; qui présente le thème d’Agamemenon. Les tubas sont magnifiques, quoiqu’un peu imprécis au début. Les cuivres, notamment les trompettes sont justes et percutantes. Quant aux cordes, elles réalisent des prouesses remarquables, notamment à la finale. Cependant, les altos sont parfois trop secondaires. Finalement, les percussions amènent un motif intéressant qui ne passe pas inaperçu sous la baguette de Nézet-Séguin.

Agnes Zwierko dans le rôle de la mère vole la vedette. Son arrivée dynamise l’opéra et ses notes graves traduisent la hargne, mêlée à l’impuissance de son personnage. Zwierko est la seule à véritablement habiter la scène et à se l’approprier. On en garde un bon souvenir.

Lise Lindstrom déçoit dans le rôle d’Elektra. L’émotion et la tension du personnage sont comprises par l’artiste, mais sur le plan technique, la projection est quelquefois défaillante, ainsi que le soutien vocal. Trop souvent, les notes sont lâchées. Les crescendo sont trop rapides. Aussi, certaines lignes dans la Scène 2 sont trop timides et moins convaincantes.

Dans le rôle de Chrysothémis, Nicola Beller Carbone livre une performance empreinte de musicalité. On constate que cette chanteuse est avant tout une musicienne qu’une comédienne. Ainsi, ses lignes sont très nuancées et senties. En somme, la critique d’Elektra à l’Opéra de Montréal est mitigée. Sur le plan musical, l’interprétation et la direction sont intéressantes, mais sur le plan scénique, la production n’est pas aboutie.

Elektra est présenté à l’Opéra de Montréal jusqu’au 2 novembre 2015. Pour plus de renseignements ou pour acheter vos billets, visitez le www.operademontreal.com.

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Par Mathieu Pothier

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