Lumière et noirceur: Nick Cave & The Bad Seeds au Métropolis de Montréal – Bible urbaine

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Lumière et noirceur: Nick Cave & The Bad Seeds au Métropolis de Montréal

Lumière et noirceur: Nick Cave & The Bad Seeds au Métropolis de Montréal

Une lueur parmi les ténèbres

Publié le 30 mai 2017 par Isabelle Lareau

Crédit photo : François Nadeau

Dès que les portes se sont ouvertes, plusieurs personnes se sont positionnées devant la scène, histoire de ne pas manquer un seul moment. Nous sentions une fébrilité contenue dans l’air. Un peu comme si les spectateurs avaient de grandes attentes, que cette soirée serait mémorable, c’est-à-dire à la hauteur du statut de légende vivante que représente le ténébreux M. Cave.

D’emblée, il est clair que, malgré la chimie entre les sept musiciens, c’est Nick Cave qui est le maître d’orchestre, voire la vedette. Une introduction préenregistrée retentit, et les Bad Seeds font leur entrée sur la scène et prennent leur place. Le chanteur apparaît quelques minutes plus tard, se penche en guise d’acquiescement et salue la foule, qui redoubla d’applaudissement et d’encouragement. Il s’est assis sur une chaise, à côté d’un lutrin (qu’il a regardé à deux reprises pendant le concert), et a offert, d’une voix très émotionnelle, «Anthrocene».

Ensuite, il enchaîna avec une autre pièce de son plus récent album, «Jesus Alone», dont les paroles relatent la tragédie entourant le décès de son fils Arthur (15 ans, chute d’une falaise lors d’une sortie avec des amis, alors qu’il avait pris du LSD). Malgré toute la tristesse qui découle d’une telle catastrophe personnelle, Cave chanta avec justesse et chagrin, sans jamais oublier son rôle de chanteur. Ce fut un moment puissant. Peu après, il se plaça à l’avant-scène, où une extension lui permettait de surplomber les gens réunis au parterre, devant lui. Il semblait à l’aise mais peu solide. Il donnait l’impression de flotter mollement…

Bien que la formation ait interprété tous les morceaux de Skeleton Tree, elle s’est permis, entre autres, de revisiter Push the Sky Away. «Higgs Boson Blues» a donné l’occasion au chanteur d’être plus présent, de se matérialiser peu à peu. Se rapprochant du public, il n’hésita pas à toucher les mains à proximité. Il a également parlé avec les spectateurs, reconnaissant que l’avant-scène était drôlement conçue et que «It must be a terrifying angle, I’m aware of that…», ce qui a fait rire l’auditoire.

Il annonça ensuite «I’m gonna tell you about a girl», ce qui a immédiatement entraîné des cris de joie, tandis que Cave et ses Seeds entonnaient «From Her To Eternity». Le public était visiblement enchanté et le chanteur semblait, finalement, pleinement investi dans la représentation, prenant vie sous nos yeux. À partir de ce moment, la foule s’est animée et applaudissait de plus en plus chaleureusement. «Tupelo» a fait grimper l’intensité d’un cran et «Jubilee Street» a causé la frénésie. «The Ship Song» n’a pas eu le même effet cependant, causant une courte accalmie.

Par la suite, le chanteur s’est adressé à la foule pour les remercier (ce qu’il a fait à quelques reprises). Il a aussi confié avoir visité la ville pendant la journée, profitant des bagels du Plateau et explorant les rues de Montréal en voiture. Il a avoué avoir beaucoup pensé à Leonard Cohen, qui fut une très grande influence pour lui et ses musiciens. Quelqu’un, dans la foule, a demandé s’il était possible que le groupe joue une chanson du regretté poète, ce à quoi Cave a rétorqué avec rapidité: «We wouldn’t fucking dare…» et de réaliser presque aussi instantanément: « Oh wait, we did…» (En effet, ils ont repris, par le passé, «I’m Your Man», «Suzanne», «Tower Of Song» et «Avalanche»…)

La formation a poursuivi avec les succès «Into My Arms», «Girl in Amber», et «I Need You», l’ambiance était électrisante, et ces pièces furent interprétées magnifiquement. La foule ressentait la beauté et la tristesse de ces chansons.

Cette mélancolie fut de courte durée; Cave et ses acolytes ont offert une version explosive de «Red Right Hand» ainsi que de «The Mercy Seat», où il a hurlé les paroles avec une conviction étonnante et sincère. Le groupe a tenté de conclure cette soirée émouvante avec l’extrait «Skeleton Tree». La foule savait qu’en insistant un peu les musiciens offriraient un rappel. Ils ont, avec bonne humeur, joué quatre chansons supplémentaires, dont les excellentes «Stagger Lee» et «Push the Sky Away».

Ce fut un superbe concert; les musiciens ont su jouer avec précision et ont créé des moments fantastiques en improvisant sur certaines chansons. Ces instants de cacophonie mélodique furent déchaînés et «enlevants». L’apport du violoniste et multi-instrumentiste Warren Ellis est indéniable. Nick Cave constitue l’une des forces incontournables du rock et surtout un leader incomparable. Sa voix était très bonne, imprégnée de sensibilité, et ce, sans jamais se briser. 

Élégant, débonnaire, intense et sombre, il a une présence sur scène singulière et mystérieuse. Mais surtout, il séduit par sa capacité de sublimer l’obscurité en ravissement. L’auditoire était suspendu à ses lèvres.

Comme le disait si bien Leonard Cohen, «Il y a une fissure en toute chose. C’est ainsi qu’entre la lumière».

L'événement en photos

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Par François Nadeau

L'avis


de la rédaction

Grille des chansons

1. Anthrocene

2. Jesus Alone

3. Magneto

4. Higgs Boson Blues

5. From Her to Eternity

6. Tupelo

7. Jubilee Street

8. The Ship Song

9. Into My Arms

10. Girl in Amber

11. I Need You

12. Red Right Hand

13. The Mercy Seat

14. Distant Sky

15. Skeleton Tree

Rappel

16. Rings Of Saturn

17. Mermaids

18. Stagger Lee

19. Push the Sky Away

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