La poétesse britannique Kate Tempest à La Sala Rossa de Montréal – Bible urbaine

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La poétesse britannique Kate Tempest à La Sala Rossa de Montréal

La poétesse britannique Kate Tempest à La Sala Rossa de Montréal

Qui sème le chaos récolte la tempête

Publié le 7 avril 2017 par Marie-Eve Linck

Crédit photo : www.facebook.com/katetempest

La pluie torrentielle qui s’abattait sur Montréal n’a pas empêché les centaines de personnes de se masser dans La Sala Rossa qui affichait complet, en ce jeudi soir, pour accueillir pour sa première fois à Montréal l’artiste britannique Kate Tempest qui venait nous présenter son deuxième et plus récent album, Let Them Eat Chaos. On lui avait dit que la métropole serait difficile, même que les gens ne se présenteraient pas. Elle semblait agréablement surprise par la foule qui, selon ses dires, était la meilleure de sa tournée jusqu’à maintenant. Elle a dû être conseillée par un Canadien anglais…

C’est accompagnée de trois musiciens, blottis derrière des claviers, que la poétesse de 31 ans est entrée sur scène. Kate Tempest n’a l’air de rien comme ça; juste de la fille d’à côté. Mais lorsque cette artiste ouvre la bouche, wow!, elle impressionne et commande le respect.

Tempest fait dans la performance poétique; elle se situe entre le poète qui déclame et le rappeur qui rhyme. Les paroles s’enchaînent, leur flot déferle parfois à une vitesse impressionnante, et à d’autres moments se laissent savourer lentement. Sa livraison, empruntant souvent au grime londonien, est parfois acrobatique, son phrasé ingénieux; la forme appuie constamment le texte. La poétesse joue beaucoup avec le rythme, fait osciller les vers en symbiose avec les percussions et la musique électronique qui les accompagne. D’ailleurs, la synchronisation des musiciens avec l’artiste doit être parfaite, et elle l’était!

Et Tempest, elle tempête. Son album Let Them Eat Chaos est une diatribe contre le monde injuste et précaire dans lequel on vit, la société de consommation, le désir de performance, l’appât du gain, la frivolité des relations, et j’en passe… Tout ça à partir de quatorze histoires, racontées à la façon d’un narrateur omniscient, où l’on suit la vie, l’espace d’une nuit, d’autant de personnages, habitant le même immeuble londonien. C’est un album concept où les histoires, qui se déroulent toutes à 4h18, se rejoignent en une allégorie. Il nous a été livré, hier, dans sa totalité.

Si le particulier rejoint l’universel, il faut quand même noter que les textes réfèrent essentiellement à la vie à Londres, et certains passages ont peut-être eu moins de résonance pour les gens d’ici. Mais pour quiconque ayant déjà vécu dans la capitale britannique, c’est un portrait d’une incroyable justesse de ce que c’est que de vivre dans cette ville extraordinaire, mais qui malmène souvent ses habitants. Si le constat est sombre, on trouve dans ses textes beaucoup de clins d’œil amusants et même quelques blagues au détour.

L’artiste londonienne fait autant dans l’étude sociologique que dans l’art. Et la foule a applaudi à certaines observations. Car le public est attentif, il n’a pas trop le choix: un moment d’inattention et on perd vite le fil. Puis, avant de commencer, l’artiste a demandé aux spectateurs de vivre le moment, et donc de laisser de côté leur joujou technologique préféré. Ils ont obtempéré. Être attentif ne veut pas dire qu’on ne peut pas bouger; les «chansons» de Tempest ont un bon groove et les gens présents se sont dandinés toute la soirée.

Après un concert assez bref (sans rappel) mais intense, Kate Tempest nous a quittés sur ces mots: «Love more. Wake up and love more». Je ne sais pas si on va plus aimer son prochain, mais toi, Kate, on t’aime encore plus.

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