Entrevue avec Brigitte Haentjens dans le cadre du spectacle «Ta douleur» – Bible urbaine

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Entrevue avec Brigitte Haentjens dans le cadre du spectacle «Ta douleur»

Entrevue avec Brigitte Haentjens dans le cadre du spectacle «Ta douleur»

Travailler avec la douleur comme matière

Publié le 16 décembre 2013 par David Bigonnesse

Crédit photo : Angelo Barsetti

Malgré une thématique qui n’a rien de réjouissant, la metteure en scène Brigitte Haentjens a visiblement eu beaucoup de plaisir à travailler l’œuvre Ta douleur avec Anne Le Beau et Francis Ducharme présentée au Quat’Sous cet automne. Bible urbaine s’est entretenue avec la directrice artistique et chorégraphique du spectacle dans son bureau des Productions Sibyllines à Montréal.

Dans cette création, la représentation de la douleur s’incarne avant tout physiquement et la recherche s’inscrivait d’ailleurs dans la même perspective, comme l’indique Brigitte Haentjens, qui assurait la direction artistique et chorégraphique du spectacle. «La recherche était vraiment corporelle, donc, à la base, c’était le but: essayer de faire dire au corps tout ce qu’il peut dire, en dehors des mots. Et quand les mots arrivent, c’est lorsqu’on ne peut pas s’en passer, quand la situation l’exige. C’était très intéressant de faire cette recherche-là sur le corps, puisque le corps est l’objet de beaucoup de douleurs», explique-t-elle.

La directrice artistique du Théâtre français du CNA depuis 2012 avoue que la thématique de la douleur offrait un mode exploratoire très riche, compte tenu des multiples situations que cette souffrance peut évoquer. L’inspiration venait alors de plusieurs endroits. «Parfois, il s’agissait de situations très concrètes qu’on peut répertorier dans la vie quotidienne. Parfois, on s’est inspiré de tableaux. Il y a énormément d’œuvres picturales qui mettent en scène la douleur», confie la femme, indiquant au passage que les situations moins précises, plus abstraites, faisaient aussi partie de cet éventail de possibilités.

Brigitte Haentjens, le sourire aux lèvres, affirme qu’elle n’a rencontré aucune difficulté pendant la mise en forme de Ta douleur, qui s’est échelonnée sur environ deux ans. «Le processus était très organique, jamais forcé. Lorsqu’il manquait quelque chose pour arriver à ça, on le cherchait ensemble. Le processus était très transparent.» Cette création est d’ailleurs le fruit d’une collaboration à trois; Anne Le Beau et Francis Ducharme ayant participé au façonnement de l’œuvre. Haentjens rappelle que les trois artistes ont travaillé longtemps et progressivement pour arriver à ce résultat.

Au sujet de la présentation initiale de 2012, l’interviewée précise que peu de modifications ont été apportés pour la version présentée actuellement au Quat’Sous. «Des tous petits changements, mais vraiment mineurs. Ce sont des précisions de gestes, des toutes petites choses que le spectateur ne voit probablement pas. Je dirais que le changement majeur, c’est le temps qui fait l’œuvre dans le corps des interprètes. Peut-être que maintenant c’est moins volontaire, c’est plus intérieur.» Elle souligne toutefois que Ta douleur «a toujours été une pièce qui a été extrêmement difficile à danser, à faire, car je ne sais pas si on peut appeler cela danser… C’est une pièce très exigeante, très acrobatique, et c’est très demandant pour les interprètes.»

Quel rapport le spectateur entretient-il avec ce spectacle? La metteure en scène d’origine française croit que cela dépend du spectateur, mais pense que cette œuvre demande un certain abandon de sa part. Elle n’hésite pas à dire qu’elle aime lorsqu’il y a des réactions dans la salle. «Quand on l’a fait à Ottawa, il y a des gens qui sortaient pendant la scène qu’on appelle de «viol», expose la femme. «Mais c’est sûr que j’aime que ça ouvre des portes, que ça fasse réfléchir, que ça conforte, que ça confronte, que ça bouscule. Il n’y a rien qui m’énerve plus que lorsqu’un spectacle se termine on dise: «Ouais, c’était l’fun…» et puis il n’y a rien qui se passe. Moi, j’aime mieux que quelqu’un sorte de là en criss, que quelqu’un sorte de là en disant: «Ah, c’était bien».»

*Cliquez ici pour consulter notre critique du spectacle: labibleurbaine.com/ta-douleur.

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