«La cantate intérieure» de Sébastien Harrisson au Théâtre de Quat'Sous – Bible urbaine

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«La cantate intérieure» de Sébastien Harrisson au Théâtre de Quat’Sous

«La cantate intérieure» de Sébastien Harrisson au Théâtre de Quat’Sous

Une partition prometteuse qui sonne faux

Publié le 2 septembre 2015 par Charlotte Mercille

Crédit photo : Marlène Gélineau Payette

Pour sa plus récente œuvre, Sébastien Harrisson s’est intéressé au rapprochement humain. Entre le passé et le présent, deux anonymes de la cité partagent l’intimité fortuite d’une installation d’art contemporain. Le Théâtre de Quat’Sous ouvrait ainsi sa 60e saison, hier soir, avec la pièce «La cantate intérieure», dans une mise scène signée Alice Ronfard. Tous les ingrédients du succès y étaient, mais la pièce s’est pourtant révélée décevante.

Un carambolage sur l’autoroute bouleverse non seulement l’itinéraire d’un messager de la compagnie UPS, mais aussi son existence en entier. La silhouette d’une femme qui appartient peut-être à son passé le hante. Toutes les semaines, il visite la chambre convertie en exposition dans laquelle il l’a aperçue pour y entendre sa voix. Ébranlé, il recherche sa propre identité à travers celle de l’inconnue.

Toute l’intrigue se passe au sein du cube de l’exposition, dans un huis clos intense entre deux étrangers, l’artiste et le messager. Ce dernier supplie la jeune femme de croire qu’il fait partie de son exposition. Que les mots de son œuvre supposément inventée se retrouvent contre toute attente dans son portefeuille. La salle devient alors un relais entre deux existences tout à fait isolées, le même qui relie l’artiste à son public.

La métaphore est belle, mais peine à engager le spectateur. Au fil des scènes, les projections se confondent sans se suivre logiquement. L’impression générale manque de finition, alors qu’on voit les pixels du désordre de mots tapissant les murs. On comprend mal ce que le numérique est censé apporter à la mise en scène, étant donné que la conception bâclée est loin de l’utiliser à son plein potentiel.

Le décor est terne, tout comme les costumes, sauf pour la prestance du «fil conducteur» de la pièce, Claire Bonaparte (Dorothée Berryman). Les textes ne semblent pas avoir été assez appropriés par les comédiens, comme s’ils avaient appris leurs répliques en catastrophe. Les sautes d’humeur exagérées des personnages surprennent, parce qu’elles manquent de sincérité. L’interprétation envoûtante de Berryman sauve pratiquement du naufrage.

Le dénouement ne fait qu’empirer la confusion du spectateur, la fébrilité de la séparation des deux personnages étant gâchée par de la musique rock et un défilement brusque d’images sans liens. La mise en scène gagnerait certainement à être plus appliquée et surtout mieux ficelée.

Somme toute, la partition imaginée par Sébastien Harrisson n’aura pas trouvé un orchestre à la hauteur de sa beauté. Saluons tout de même l’interprétation captivante de cette grande dame du théâtre qu’est Dorothée Berryman dans la cacophonie imposée par la mise en scène. Les thèmes intrigants de La cantate intérieure ne sont donc pas tombés dans l’oreille d’un sourd, mais auraient pu être abordés sur une note bien plus juste vu la qualité de l’instrumentation.

«La cantate intérieure» est une production de la compagnie Les Deux Mondes, présentée en codiffusion avec le Théâtre de Quat’Sous jusqu’au 11 septembre 2015.

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