«Norge» de Kevin McCoy à l'ESPACE GO – Bible urbaine

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«Norge» de Kevin McCoy à l’ESPACE GO

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Le coeur gros

Publié le 30 novembre 2016 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Stéphane Bourgeois

Il y a plusieurs parallèles à faire entre les cultures québécoises et norvégiennes, nous assure dans cette pièce Kevin McCoy, dramaturge qui est pour sa part né aux États-Unis et qui est devenu citoyen du Québec par amour, autant d'un homme que du peuple québécois. Norge est son deuxième solo, et c’est un spectacle plutôt singulier auquel nous avons assisté.

Qualifié par l’ESPACE GO de «spectacle multimédia», c’est une présentation comportant tout de même plusieurs éléments théâtraux, une autofiction de prime abord, dans laquelle McCoy, directeur artistique du Théâtre Humain, est seul sur scène avec une pianiste (Esther Charron) pour nous raconter sa singulière quête identitaire, tout en nous abreuvant d’informations sur la culture norvégienne.

Le narrateur décide d’investiguer à propos d’un événement qui l’a toujours perturbé depuis sa plus tendre jeunesse: l’exil soudain, à 14 ans, de sa grand-mère, qui a quitté la Norvège suite à un incident qui restera auréolé de mystère, comme un coït d’enquête interrompu.

Avec le support visuel de rétroprojections, et de quelques objets évocateurs, il effectue une reconstitution dramatique de son séjour – d’ailleurs fort captivant – en pimentant le tout de détails sur sa vie personnelle. L’aspect «carnet de route» est fascinant, rythmé par les Pièces lyriques de Grieg, et berce notre imagination tout doucement. La personnalité fort attachante de McCoy y est pour beaucoup, et c’est pourquoi on se sent à la fois un peu émus, mais surtout surpris lorsqu’il entre dans des détails un peu exhibitionnistes sur un problème médical qui l’afflige, et sur la démence soudaine de ses parents.

L’aventure prend rapidement la forme d’un retour aux sources, et d’une chasse généalogique, alors que McCoy apprend l’existence d’une branche contemporaine de sa propre famille, les Hansen, résidant en Norvège. Il se retrouve en contact avec eux, puis les visite, se rendant même jusqu’à la visite de la maison ancestrale, de nos jours abandonnée, de sa grand-mère.

Les projections sont essentielles pour faire voyager l’esprit du spectateur, et elles sont ici utilisées à leur plein potentiel, parfois de façon interactive. La trame sonore parfois assourdissante nous plonge dans le tourment émotif du narrateur, et illustre les multiples changements de ton. Beaucoup d’émotions sont au rendez-vous, tant dans la salle que sur scène – McCoy se laisse parfois emporter, au bord des larmes, démontrant involontairement la force de son récit, happé par son propre drame.

On transcende ici absolument la présentation d’une conférence des Grands Explorateurs, bien entendu, et le talent oratoire de Kevin McCoy – ainsi que son mignon accent – y sont pour beaucoup. C’est en tout cas l’une des pièces les plus variées que nous avons eu l’occasion de voir cette année, incorporant des notions de géographie et d’histoire, des évocations érudites à propos d’Ibsen et des œuvres d’Edvard Munch, de l’actualité internationale, des radiographies, de la danse interprétative, et un créateur vulnérable avec un cœur gros comme la Norvège.

L'événement en photos

Par Stéphane Bourgeois

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